Les nouveaux cuirs
Le cuir animal, vers la fin d’une époque
Le cuir s’inscrit dans une tradition et une culture qui nous sont chères. Cette matière est encore aujourd’hui l’emblème d’un savoir-faire dont la France a toujours porté haut les couleurs. Mais analysée sous le prisme des enjeux climatiques et environnementaux d’aujourd’hui, la réalité sur les « vertus » du cuir est bien moins flatteuse que les croyances profondément ancrées dans l’inconscient collectif ne le laissent imaginer. Et la gloire d’antan de ce matériau ne peut dissimuler son impact très négatif sur notre planète.
Présenter le cuir comme une matière raisonnable par essence, parce que si la peau n’était pas exploitée pour faire du cuir elle serait alors jetée ou incinérée, c’est nier la réalité économique qui entoure le commerce des peaux ainsi que celle d’une industrie tout entière. Et, au-delà du processus de tannage lui-même, l’élevage des animaux pour leur exploitation (lait, viande, peaux, autres débouchés) a des impacts négatifs importants sur notre environnement.
Entre contribution significative au réchauffement climatique, aggravation de la perte de biodiversité, contribution majeure à la déforestation, consommation excessive d’eau ou encore utilisation de nombreux produits chimiques, multiples sont donc les raisons de questionner le cuir animal et de s’interroger sur les alternatives possibles.
Pendant que la filière du cuir animal essaie de trouver des solutions pour réduire son impact, MAES Paris choisit de favoriser l’esprit d’innovation pour repenser dès aujourd’hui la maroquinerie à l’aune des enjeux de notre siècle et contribuer à préserver l’environnement. En favorisant une innovation positive, autour de matières d’origine végétale, pour offrir une maroquinerie meilleure pour la planète.
Différentes orientations, un unique objectif : offrir une nouvelle vision du cuir, tout aussi qualitative mais désormais responsable
Plusieurs approches existent aujourd’hui, à des degrés de maturité différents. Mais toutes vont dans le sens d’une amélioration immédiate de l’impact environnemental par comparaison au cuir animal.
La culture de cellules animales en laboratoire, qui pourrait permettre d’obtenir une « vraie » peau en 7 à 9 mois sans s’attaquer à l’animal, semble offrir une approche intéressante. Mais cette approche, qui reste expérimentale à date, nécessite toujours de recourir au tannage et donc de trouver d’autres options innovantes pour ne pas retomber dans les travers de la méthode actuelle.
Les travaux de recherche sur le Mycélium sont également très intéressants. Ces filaments, qui constituent l’appareil végétatif de champignons, forment des réseaux souterrains particulièrement denses et offrent des propriétés physiques très intéressantes. En particulier deux sociétés américaines, MycoWorks et BoltThread, se sont emparées du sujet et travaillent actuellement au développement de ces nouveaux cuirs dits, par vulgarisation, « de champignon ». Cependant ces produits, s’ils ont été mis en avant par de belles collaborations (comme celle de la maison Hermès avec la société MycoWorks), ne sont pas encore arrivés à un stade de maturité commerciale suffisant pour les voir transformer rapidement la maroquinerie.
Les solutions les plus matures aujourd’hui consistent à répliquer la technique du cuir « vinyl » des années 80 et 90, en remplaçant les composants issus de la pétrochimie par des composants biosourcés. On a vu fleurir ces dernières années les cuirs de maïs, de pomme, de raisin, de cactus… Ces matières s’appuient en général sur la même technique : l’utilisation d’une toile textile (coton, polyester, nylon) sur laquelle est déposé une résine biosourcée, mélange du composant principal annoncé et de BioPU (polyuréthane réalisé à partir de polyols extraits d’huiles végétales).
Ces matières présentent des bilans environnementaux bien meilleurs que leur équivalent d’origine animale. Ainsi un cuir d’ananas présente un impact 5 fois meilleur[1] qu’un cuir animal en termes de contribution au réchauffement climatique, et pour certains cuirs de cactus l’impact est même près de 19 fois[2] meilleur grâce aux capacités extraordinaires d’absorption de CO2 de certaines variétés.
Lorsque l’on constate que près de 70% des émissions de CO2 d’un vêtement ou d’une chaussure viennent des matières premières qui les compose et que l’on constate que le cuir est de toutes les matières utilisées par l’industrie de la mode celle qui a le plus mauvais impact sur notre environnement, loin devant le coton ou même les matières synthétiques, il va de notre responsabilité de nous interroger sur l’intérêt de continuer à utiliser du cuir d’origine animale.
Pour MAES PAris le choix a été simple et immédiat : développer une nouvelle approche de la maroquinerie, digne des enjeux de développement durable qui s’imposent à nous tous, en alliant le savoir-faire traditionnel des maitres maroquiniers français à l’innovation des alternatives végétales au cuir animal. Et ainsi montrer qu’une nouvelle voie est possible.
[1] HIGG Material Sustainability Index
[2] Analyse Cycle de Vie réalisée par un fabricant de cuir de cactus